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Traduction d’AID pour Les-crises.fr n° 2023-110

Le feuilleton des pressions exercées sur le Pakistan 2/2

Par Ryan Grim et Murtaza Hussain, traduction par Jocelyne Le Boulicaut

samedi 14 octobre 2023, par JMT

AID soutient financièrement le très intéressant site "Les-crises.fr" depuis plusieurs années. Nous avons fait un pas de plus en participant aux traductions des textes anglais quand le site fait appel à la solidarité de ses adhérents. Nous avons donc mandaté une de nos adhérentes, Jocelyne LE BOULICAUT, enseignante universitaire d’anglais retraitée, pour y participer en notre nom et nous indemnisons son temps passé avec notre monnaie interne

Le feuilleton des pressions exercées sur le Pakistan 2/2

Le 9 août 2023, 12h00 p.m. par Ryan Grim, Murtaza Hussain

Des militants du parti Pakistan Tehreek-e-Insaf et des partisans de l’ancien Premier ministre pakistanais Imran Khan affrontent la police lors d’une manifestation contre l’arrestation de leur leader à Peshawar, le 10 mai 2023 (Photo Hussain Ali/Anadolu Agency via Getty Images)

Démocratie et militaires

Depuis des années, les relations de parrainage du gouvernement américain vis à vis de l’armée pakistanaise, celle-ci jouant depuis longtemps un véritable rôle de courroie de transmission dans le jeu politique du pays, sont perçues par de nombreux Pakistanais comme un obstacle insurmontable quant à la capacité du pays à développer son économie, à lutter contre une corruption endémique et à mener une politique étrangère constructive.

Cette relation, qui, sous couvert d’apparences de démocratie, a fait de l’armée une force intouchable sur la scène politique nationale, donne l’impression que le Pakistan n’a pas bénéficié d’une véritable indépendance, ce qui rend encore plus explosive l’accusation d’implication des États-Unis dans la destitution d’un premier ministre très populaire.

La source de The Intercept, qui a eu accès au document en tant que membre de l’armée, parle de sa profonde désillusion à l’égard de la direction militaire du pays, de l’impact sur le moral de l’armée suite à son implication dans la lutte politique contre Khan, de l’exploitation de la mémoire des militaires décédés à des fins politiques dans la récente propagande militaire, et du désenchantement généralisé du public à l’égard des forces armées dans le cadre de la répression.

Ils estiment que l’armée est en train de précipiter le Pakistan vers une crise similaire à celle de 1971 qui avait entraîné la sécession du Bangladesh. Les responsables de la source ont ajouté qu’ils espéraient que le document divulgué confirmerait enfin ce que les gens ordinaires, ainsi que les simples soldats des forces armées, subodoraient depuis longtemps concernant l’armée pakistanaise, que cela imposerait une remise en question au sein de l’institution.

En juin dernier, dans le cadre de la répression militaire contre le parti politique de Khan, l’ancien secrétaire général de Khan, Azam Khan, a été arrêté et détenu pendant un mois. Pendant sa détention, Azam Khan aurait enregistré une déclaration devant un membre de la magistrature, affirmant que le câble était bien réel, mais que l’ancien premier ministre en avait exagéré le contenu à des fins politiques.

Un mois après la réunion mentionnée dans le câble, et seulement quelques jours avant que Khan ne soit destitué, Qamar Bajwa, qui était alors chef de l’armée pakistanaise, a publiquement rompu avec la position de neutralité de Khan et a prononcé un discoursdans lequel il a qualifié l’invasion russe « d’immense tragédie » et critiquant la Russie.

Ces remarques donnaient une dimension publique aux observations en privé de Lu, telles que consignées dans le câble, qui affirmaient que la neutralité du Pakistan était la politique de Khan, mais pas celle de l’armée.

La politique étrangère du Pakistan a singulièrement changé depuis le limogeage de Khan, le Pakistan penche maintenant très clairement du côté des États-Unis et de l’Europe en ce qui concerne le conflit ukrainien.

Abandonnant sa position de neutralité, le Pakistan apparaît désormais comme pourvoyeur d’armes à l’armée ukrainienne. On voit régulièrement des images d’obus et de munitions produits au Pakistan dans les séquences filmées du champ de bataille.

Dans une interview datée du début de l’année, un officiel de l’Union européenne a confirmé que le Pakistan soutenait l’Ukraine sur le plan militaire.

Par ailleurs, le ministre ukrainien des Affaires étrangères s’est rendu au Pakistan en juillet dernier dans le cadre d’une visite dont on pense généralement qu’elle concernait la coopération militaire, mais dont on dit publiquement qu’elle était plutôt consacrée au commerce, à l’éducation et à l’environnement. Ce réalignement vers les États-Unis a a apparemment profité à l’armée pakistanaise.

Le 3 août, un journal pakistanais a rapporté que le Parlement avait approuvé la signature d’un pacte de défense avec les États-Unis prévoyant « des exercices conjoints, des opérations, la formation, des infrastructures et de l’équipement ». Cet accord était destiné à remplacer un accord précédent d’une durée de 15 ans entre les deux pays et qui avait expiré en 2020.

Le chef de l’armée pakistanaise, le général Qamar Javed Bajwa, assiste à un défilé militaire à Islamabad, Pakistan, 23 mars 2022.

« Évaluation » du côté pakistanais

Les commentaires sans ambages de Lu quant à la politique intérieure du Pakistan ont suscité une réelle inquiétude du côté pakistanais. Dans une courte section « évaluation » en bas de page du rapport, on peut lire : "Don (Donald Lu) n’aurait pas pu adopter une démarche aussi tranchée sans avoir l’aval exprès de la Maison Blanche, dont il s’est réclamé à maintes reprises"

Il est clair que Don a parlé à tort et à travers du processus politique interne du Pakistan. Le câble se termine par une recommandation « d’y réfléchir sérieusement et d’envisager de faire une démarche appropriée auprès du "U.S. Cd’ A a.i" de l’ambassade des États-Unis à Islamabad » – référence très directe au chargé d’affaires ad interim, qui est de fait le chef intérimaire d’une mission diplomatique en l’absence de son chef accrédité.

Une protestation diplomatique a ensuite été émise par le gouvernement de Khan. Le 27 mars 2022, le même mois que la réunion avec Lu, Khan a parlé publiquement du câble, brandissant une copie pliée lors d’un rassemblement.

Il aurait également informé de son contenu les responsables des différentes agences de sécurité pakistanaises lors d’une réunion sur la sécurité nationale.Il est difficile de savoir ce qui s’est exactement passé en matière de communications entre le Pakistan et les États-Unis au cours des semaines qui ont suivi la réunion mentionnée dans le câble.

Le mois suivant, cependant, le vent politique avait tourné. Le 10 avril, Khan a été démis de son mandat lors d’un vote de défiance. Le nouveau Premier ministre, Shehbaz Sharif, a finalement confirmé l’existence du câble et a reconnu que certains des messages transmis par Lu étaient inappropriés. Il a déclaré que le Pakistan avait formellement élevé une protestation, mais a précisé que le câble ne confirmait en rien les accusations plus générales formulées par Khan.

À plusieurs reprises, Khan a laissé entendre, en public, que le câble top secret démontrait que les États-Unis avaient orchestré sa destitution, mais il a par la suite révisé son jugement lorsqu’il a exhorté les États-Unis à condamner les violations des droits humains commises à l’encontre de ses partisans.

Dans une interview accordée à The Intercept en juin, il a déclaré que les États-Unis avaient peut-être fait pression pour son éviction, mais ils l’avaient fait uniquement parce qu’ils étaient manipulés par l’armée.

La divulgation de l’intégralité du câble, plus d’un an après la destitution de Khan et après son arrestation, permettra enfin de se faire une idée précise des différentes affirmations contradictoires.

Tout bien considéré, le texte du cryptogramme laisse fortement entendre que les États-Unis ont encouragé la destitution de Khan. Selon le câble, si Lu n’a pas directement exigé la destitution de Khan, il a déclaré que le Pakistan souffrirait de graves conséquences, notamment un isolement international, si toutefois Khan devait rester Premier ministre, tout en faisant, dans le même temps, miroiter des récompenses en cas contraire.

Des soldats ukrainiens chargent des roquettes Yarmuk fabriquées par les usines de munitions du Pakistan (Crédit image : État-major général des forces armées ukrainiennes)

Ces propos semblent avoir été interprétés comme un signal donné aux militaires pakistanais pour qu’ils agissent. En plus de ses autres problèmes juridiques, Khan lui-même a continué à être pris pour cible en raison de la façon dont le nouveau gouvernement a exploité le câble secret.

À la fin du mois dernier, le ministre de l’Intérieur, Rana Sanaullah, a déclaré que Khan serait poursuivi en vertu de la loi sur les secrets officiels (Official Secrets Act) dans le cadre de l’affaire du câble.

« Khan a ourdi une conspiration contre les intérêts de l’État et une procédure sera engagée contre lui au nom de l’État pour violation de la Loi sur les secrets officiels pour avoir divulgué une communication chiffrée confidentielle émanant d’une mission diplomatique », a déclaré Sanaullah .

Khan a maintenant rejoint la longue liste des hommes politiques pakistanais qui n’ont pas réussi à finir leur mandat pour avoir eu maille à partir avec l’armée. Selon Lu, et tel que cité dans le câble, Khan a été personnellement tenu par les États-Unis pour responsable de la politique de non-alignement du Pakistan au cours du conflit ukrainien.

Le vote de défiance et ses implications pour l’avenir des relations américano-pakistanaises ont occupé une place importante tout au long de la conversation. « Honnêtement », aurait déclaré Lu dans le document, en évoquant la perspective du maintien de Khan à son poste, « je pense que le Premier ministre se trouvera très fortement isolé vis-à-vis de l’Europe et des États-Unis ».

7 mars 2022, Chiffre diplomatique pakistanais (Transcription)

The Intercept publie le corps du câble ci-dessous, en corrigeant les fautes de frappe mineures dans le texte, dans la mesure où de tels détails peuvent être utilisés pour filigraner des documents et tracer leur diffusion. The Intercept a supprimé les indications de classification et les éléments numériques qui pourraient être utilisés à des fins de traçage.

Classé « Secret », il relate la rencontre entre des responsables du Département d’État, dont le secrétaire d’État adjoint en charge des affaires de l’Asie Centrale et Méridionale Donald Lu, ainsi qu’ Asad Majeed Khan, qui était à l’époque ambassadeur du Pakistan auprès des États-Unis.

J’ai déjeuné aujourd’hui avec le secrétaire d’État adjoint en charge de l’Asie Méridionale et Centrale, Donald Lu. Il était accompagné du secrétaire d’État adjoint Les Viguerie. Le chef de mission (DCM) , le DA et le conseiller Qasim m’ont rejoint.

D’emblée, Don a évoqué la position du Pakistan concernant la crise ukrainienne et a déclaré que « les gens ici et en Europe s’inquiètent et se demandent pourquoi le Pakistan adopte une position neutre aussi agressive (concernant l’Ukraine), à supposer qu’une telle attitude soit même concevable. Cela ne nous semble pas si neutre que cela ».

Il a ajouté que lors de ses discussions avec le NSC (Conseil de sécurité national), « il semble assez clair qu’il s’agit ici de la politique du Premier ministre ». Il a poursuivi en disant qu’il estimait que cela était « lié aux dramatiques événements politiques actuels à Islamabad, dont lui (le Premier ministre) a besoin et qu’il essaie de rendre public ».

Ma réponse a été que ce n’était pas une lecture correcte de la situation, dans la mesure où la position du Pakistan concernant l’Ukraine était le résultat d’intenses consultations interagences. Le Pakistan n’a jamais pratiqué la diplomatie sur la place publique.

Les remarques que le Premier ministre a formulées au cours d’un rassemblement politique étaient une réaction à la lettre publique des ambassadeurs européens à Islamabad, qui allait à l’encontre de l’étiquette et du protocole diplomatiques. Tout dirigeant politique, que ce soit au Pakistan ou aux États-Unis, serait contraint de donner une réponse publique dans une telle situation.

J’ai demandé à Don si la raison de la forte réaction américaine était l’abstention du Pakistan lors du vote à l’Assemblée générale des Nations unies. Il a répondu catégoriquement par la négative et a déclaré qu’elle était due à la visite du Premier ministre à Moscou.

Il a déclaré : « Je pense que si le vote de défiance contre le Premier ministre aboutit, alors tout sera pardonné à Washington parce que la visite en Russie est considérée comme une décision du seul Premier ministre. Dans le cas contraire, nous allons vers des temps difficiles ».

Il a fait une pause avant d’ajouter : « Je ne peux pas dire comment cela sera perçu par l’Europe, mais je ne doute pas qu’elle réagira de la même manière », a déclaré Lu, ajoutant que Khan pourrait être « isolé » tant par l’Europe que par les États-Unis ».

Don a ajouté un peu plus loin qu’il semblait que la visite du Premier ministre à Moscou ait été planifiée lors des Jeux olympiques de Pékin et que le Premier ministre avait alors tenté de rencontrer Poutine, mais sans succès, et que l’idée de se rendre à Moscou ait alors germé.

L’ancien Premier ministre pakistanais Imran Khan repart après sa comparution devant la Cour suprême à Islamabad le 26 juillet 2023 (Photo : Aamir Qureshi AFP via Getty Images)

J’ai dit à Don qu’il s’agissait d’une perception complètement erronée et mal informée. La visite à Moscou était prévue depuis au moins quelques années et était le résultat d’un processus institutionnel délibératif.

J’ai souligné qu’au moment où le Premier ministre s’envolait pour Moscou, l’invasion russe de l’Ukraine n’avait pas commencé et qu’il y avait encore de l’espoir pour une résolution pacifique.

J’ai également fait remarquer que les dirigeants des pays européens se rendaient également à Moscou à peu près au même moment. Don a ajouté que « ces visites visaient spécifiquement à trouver une solution à l’impasse ukrainienne, alors que la visite du Premier ministre était motivée par des raisons économiques bilatérales ».

J’ai attiré son attention sur le fait que le Premier ministre avait clairement regretté la situation lors de son séjour à Moscou et qu’il avait espéré que la diplomatie fonctionnerait.

J’ai souligné que la visite du Premier ministre s’inscrivait dans un contexte purement bilatéral et qu’elle ne devait pas être perçue comme une approbation ou même un soutien en faveur du comportement de la Russie à l’encontre de l’Ukraine. J’ai ajouté que notre position était dictée par notre volonté de maintenir ouverts les canaux de communication avec toutes les parties.

Nos déclarations ultérieures aux Nations unies et celles de notre porte-parole en étaient une expression très claire, tout en réaffirmant notre engagement envers le principe de la Charte des Nations unies, le non-recours à la menace ou à l’emploi de la force, la souveraineté et l’intégrité territoriale des États, et le règlement pacifique des différends.

J’ai également dit à Don que le Pakistan s’inquiétait de la façon dont la crise ukrainienne se déroulerait dans le contexte de l’Afghanistan. Nous avons payé un prix très élevé en raison de l’impact à long terme de ce conflit.

Notre priorité était bien d’assurer la paix et la stabilité en Afghanistan, et pour ce faire, il était impératif d’établir une coopération et une coordination avec toutes les grandes puissances, y compris la Russie.

De ce point de vue également, il était essentiel de maintenir les canaux de communication ouverts. Ce facteur a également dicté notre position quant à la crise ukrainienne.

Lorsque j’ai évoqué la prochaine réunion de la troïka élargie à Pékin, Don a répondu que des discussions étaient toujours en cours à Washington sur la question de savoir si les États-Unis devaient participer à la réunion de la troïka élargie ou à la toute prochaine réunion d’Antalya sur l’Afghanistan en présence de représentants russes, étant donné que l’objectif des États-Unis était pour l’instant de se concentrer uniquement sur l’Ukraine lors de discussions avec la Russie.

J’ai répondu que c’était exactement ce que nous craignions. Nous ne voulions pas que la crise ukrainienne détourne l’attention de l’Afghanistan. Don n’a pas fait de commentaire. J’ai dit à Don que, tout comme lui, je lui ferais part de notre point de vue de façon très directe.

J’ai dit qu’au cours de l’année écoulée, nous avions constamment senti une réticence de la part des dirigeants américains à dialoguer avec les nôtres. Au Pakistan, cette frilosité a donné l’impression que nous étions totalement ignorés, voire considérés comme allant de soi.

Nous avons également eu le sentiment que les États-Unis s’attendaient à obtenir le soutien du Pakistan dans toutes les questions importantes pour eux, mais que ce n’était pas réciproque , et nous ne constatons pas beaucoup de soutien de la part des États-Unis sur les questions qui préoccupent le Pakistan, en particulier le Cachemire.

J’ai déclaré qu’il était extrêmement important d’avoir des canaux de communication fonctionnels au plus haut niveau afin d’éliminer cette perception. J’ai également déclaré que nous étions surpris, si notre position sur la crise ukrainienne était si importante pour les États-Unis, que ces derniers n’aient pas pris contact avec nous au plus haut niveau avant la visite à Moscou et même alors que le vote des Nations unies était prévu. (Le Département d’État avait soulevé la question au niveau du Chef de mission).

Le Pakistan attache de l’importance à la poursuite du dialogue au plus haut niveau et c’est pourquoi le ministre des Affaires étrangères a souhaité s’entretenir avec le secrétaire d’État Blinken afin de lui exposer personnellement la position et le point de vue du Pakistan sur la crise ukrainienne.

Cet demande est jusqu’ici restée sans suite. Don a répondu qu’à Washington, on pensait qu’étant donné les troubles politiques actuels au Pakistan, ce n’était pas le bon moment pour ce type de contacts et qu’il fallait attendre que la situation politique se calme au Pakistan.

Le Premier ministre Imran Khan montre une lettre, censée contenir des preuves d’un complot étranger contre le gouvernement, lors d’un rassemblement à Islamabad le 27 mars 2023 (DawnNewsT)

J’ai de nouveau réitéré notre position qui veut que les pays ne soient pas contraints de choisir un camp dans une situation complexe comme celle de la crise ukrainienne et j’ai insisté sur la nécessité d’avoir des communications bilatérales ouvertes au niveau des dirigeants politiques.

Don m’a répondu que « vous avez exprimé clairement votre position et je la transmettrai à mes dirigeants ». J’ai également dit à Don que nous avions pu constater que, lors de la récente audition de la sous-commission sénatoriale sur les relations entre les États-Unis et l’Inde, il avait défendu la position de l’Inde sur la crise ukrainienne.

Il semblait bien que les États-Unis appliquaient des standards différents qu’il s’agisse de l’Inde ou du Pakistan. Don a répondu que la vive émotion des législateurs américains face à l’abstention de l’Inde au Conseil de sécurité des Nations unies et à l’Assemblée générale des Nations unies s’était clairement exprimée lors de l’audition.

J’ai dit qu’il ressortait de l’audition que les États-Unis attendaient plus de l’Inde que du Pakistan, et que pourtant, ils semblaient plus inquiets de la position de ce dernier. Don est resté évasif et a répondu que Washington considérait les relations entre les États-Unis et l’Inde essentiellement au travers du prisme de ce qu’il se passait en Chine.

Il a ajouté que même si l’Inde entretenait des relations étroites avec Moscou, « je pense que nous assisterons à un changement de la politique de l’Inde une fois que tous les étudiants indiens auront quitté l’Ukraine ».

J’ai exprimé l’espoir que la question de la visite du Premier ministre en Russie n’aurait pas d’impact sur nos relations bilatérales. Don m’a répondu que « Je suis prêt à affirmer que, de notre point de vue, cela a déjà créé une brèche dans nos relations ».

« Attendons quelques jours pour voir si celle-ci évolue, ce qui signifierait que nous n’aurions pas de désaccord majeur sur cette question et que le problème disparaîtrait très rapidement. Dans le cas contraire, nous devrons aborder cette question de front et décider de la façon de la gérer ».

Nous avons également abordé la question de l’Afghanistan et d’autres sujets relatifs aux relations bilatérales. Cette partie de notre conversation fait l’objet d’une communication séparée.

L’évaluation

Don (Donald Lu) n’aurait pas pu adopter une démarche aussi tranchée sans avoir l’aval exprès de la Maison Blanche, dont il s’est réclamé à maintes reprises. Il est clair que Don a parlé à tort et à travers du processus politique interne du Pakistan.

Nous devons y réfléchir sérieusement et envisager de faire une démarche appropriée auprès du Chargé d’affaires par intérim de l’ambassade des États-Unis à Islamabad.

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Première partie : Le feuilleton des pressions exercées sur le Pakistan 1/2