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Traduction d’AID pour Les-crises.fr n° 2024-047

Le Nicaragua poursuit l’Allemagne en justice

Par Marjotie Cohn, traduction par Jocelyne Le Boulicaut

mardi 7 mai 2024, par JMT

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Le Nicaragua poursuit l’Allemagne en justice

Le 13 avril 2024 par Marjorie Cohn, TRUTHOUT

Marjorie Cohn est professeur émérite à la Thomas Jefferson School of Law, ancienne présidente de la National Lawyers Guild et membre des conseils consultatifs nationaux d’Assange Defense et de Veterans For Peace, ainsi que du bureau de l’Association internationale des juristes du parti démocrate. Elle est aussi Doyenne fondatrice de l’Académie populaire de droit international et Représentante des États-Unis au conseil consultatif continental de l’Association des juristes américains. Parmi ses ouvrages on compte Drones and Targeted Killing : Legal, Moral and Geopolitical Issues [Drones et assassinats ciblés : questions juridiques, morales et géopolitiques]. Elle est co-animatrice de l’émission de radio "Law and Disorder".

Les audiences (en français) à la CIJ sur la plainte du Nicaragua contre l’Allemagne pour complicité de génocide se trouvent ici et .

L’ambassadeur du Nicaragua, Carlos José Argüello Gómez, réagit suite à la deuxième journée d’audience à la Cour internationale de justice (CIJ) dans l’affaire opposant le Nicaragua à l’Allemagne concernant l’assistance financière et militaire apportée à Israël, ainsi que l’arrêt des subventions à l’organisation d’aide UNRWA (Mouneb Taim / Anadolu via Getty Images)

Alors que la campagne génocidaire d’Israël contre les Palestiniens de Gaza - qui a tué plus de 33 000 personnes - entre dans son septième mois, le Nicaragua poursuit l’Allemagne devant la Cour internationale de justice (CIJ ou Cour mondiale) pour avoir favorisé le génocide. L’Allemagne est, après les États-Unis, le plus grand fournisseur d’armes d’Israël.

Selon les accusations du Nicaragua, « l’Allemagne a fourni un soutien politique, financier et militaire à Israël en étant parfaitement au courant, au moment de l’autorisation, que l’équipement militaire serait utilisé pour commettre de graves violations du droit international, ajoutant que l’équipement militaire fourni par l’Allemagne, qui a permis à Israël de perpétrer des actes génocidaires et d’autres atrocités, comprenait des approvisionnements pour la ligne de front et les entrepôts, et était accompagné d’assurances de livraisons ultérieures telles que des munitions, de la technologie et divers composants indispensables à l’armée israélienne ».

Le Nicaragua a également fait état de la suppression par l’Allemagne du financement de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), qui « fournit à la population civile un soutien vital ».

L’Allemagne est le deuxième fournisseur d’armes d’Israël, ce qui représente 30% des importations entre 2019 et 2023. Les États-Unis, principal soutien d’Israël, lui ont fourni 69 % de ses importations d’armes au cours de la même période.

Le 12 octobre, le chancelier allemand Olaf Scholz a déclaré : « À l’heure actuelle, il n’y a qu’un endroit où doive être l’Allemagne : c’est aux côtés d’Israël. C’est ce que nous voulons dire lorsque nous affirmons que la sécurité d’Israël fait partie de la raison d’État allemande. Notre propre histoire, notre responsabilité découlant de l’Holocauste, fait que nous avons le devoir perpétuel de défendre l’existence et la sécurité de l’État d’Israël. Cette responsabilité nous guide ».

Lors d’une audience historique qui s’est tenue les 8 et 9 avril, le Nicaragua a présenté ses arguments à la CIJet l’Allemagne a réfuté les accusations.

Le Nicaragua a demandé à la Cour internationale de Justice de prononcer cinq mesures conservatoires d’ « extrême urgence » en raison de la participation présumée de l’Allemagne « au génocide plausible en cours dans la bande de Gaza, ainsi qu’aux violations graves du droit international humanitaire et autres règles impératives du droit international en vigueur ».

Daniel Müller, qui fait partie de l’équipe de juristes du Nicaragua, a rappelé à la CIJ que dix jours auparavant, lorsque la Cour avait imposé des mesures conservatoires supplémentaires à l’encontre d’Israël dans le cadre de la plainte déposée par l’Afrique du Sud, elle avait qualifié les conditions de vie à Gaza de « catastrophiques » et les évolutions les plus récentes d’« exceptionnellement graves ».

Le Palais de la Paix de la Cour internationale de justice de La Haye, 12 mars 2024 ( Nicolas Economou / Nurphoto via Getty Images)

La Cour a estimé qu’il existait « un risque imminent de préjudice irréparable au regard du droit des Palestiniens de Gaza d’être protégés contre des actes de génocide ».

« Le Nicaragua agit non seulement en son nom propre en vertu des droits et obligations que confèrent les clauses péremptoires invoquées, mais aussi au nom du peuple palestinien qui est soumis à l’une des actions militaires les plus destructrices de l’histoire moderne », a déclaré à la Cour Carlos José Argüello Gómez, ambassadeur du Nicaragua aux Pays-Bas.

Gómez a ajouté que, bien que le Nicaragua n’ait pas subi autant de traitements inhumains et de destructions que ceux que les Palestiniens endurent depuis plus de 75 ans, « il a également fait l’objet d’interventions et d’attaques militaires pendant la majeure partie de son existence et éprouve de l’empathie envers le peuple palestinien ».

Dans l’affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicar. v. U.S.), la CIJ s’est prononcée en 1984 contre l’intervention américaine au Nicaragua, laquelle se traduisait par la pose de mines dans les ports, la destruction d’installations pétrolières et l’entraînement, l’armement et l’équipement des Contras (qui tentaient de renverser le gouvernement nicaraguayen).

Gómez a déclaré que le gouvernement israélien « ne devrait pas être confondu et assimilé au peuple juif », notant que les victimes juives de l’Holocauste « éprouveraient de la sympathie et de l’empathie pour les plus de 30 000 civils, dont 25 000 mères et enfants massacrés jusqu’à présent en Palestine, ainsi que pour les 20 000 enfants orphelins et les deux mères qui sont tuées à chaque heure ».

L’Allemagne a augmenté son aide militaire à Israël et réduit le financement de l’UNRWA alors que le génocide était en cours.

La convention sur le génocide impose aux tiers l’obligation qui leur incombe en matière de prévention d’un génocide à compter du moment où ils prennent conscience qu’un génocide risque d’être commis.

Gómez a dit à la Cour qu’« il ne fait aucun doute » que l’Allemagne « était et est toujours tout à fait consciente du risque grave de génocide, et c’est très certainement vrai après votre ordonnance du 26 janvier (sur les mesures conservatoires) ».

Gómez a fait valoir que l’Allemagne était informée de la violation du droit international par Israël, citant 32 déclarations faites entre le 9 octobre 2023 et le 5 avril 2024 par des centaines d’experts, d’autorités, d’organisations, de juristes et de spécialistes très respectés accusant Israël d’avoir violé ou plausiblement violé la Convention sur le génocide.

« Fort de cette indéniable connaissance de la situation », a déclaré Gómez, « la réaction de l’Allemagne a été d’augmenter son aide militaire à Israël ». Il a également rappelé l’annonce par l’Allemagne de son intention d’intervenir en faveur d’Israël dans l’affaire Afrique du Sud v. Israël, qui est actuellement en instance devant la CIJ.

Et, selon Gómez, en dépit de la conclusion de la CIJ du 26 janvier selon laquelle Israël commettait vraisemblablement un génocide, « l’Allemagne a continué, et continue encore aujourd’hui, à fournir des armes et une assistance militaire à Israël ».

Les juges de la Cour internationale de justice, principal organe judiciaire des Nations unies, prennent place avant l’ouverture d’audiences historiques à La Haye, lundi 19 février2024 (PETER DEJONG / AP)

Pour l’année 2023, le gouvernement allemand a autorisé l’exportation d’équipements militaires et d’armes de guerre vers Israël à hauteur de 326 millions d’euros, a déclaré Müller, l’avocat du Nicaragua, au tribunal.

Les agréments d’exportation d’armes de guerre d’une valeur de 20 millions d’euros comprenaient « 3 000 armes antichars - qui, selon un fabricant allemand, sont « une boîte à outils intégrale d’armes d’infanterie portées à l’épaule » utilisées contre chars, mais aussi véhicules, structures ou bâtiments, et personnes - 500 000 cartouches de mitrailleuses, 44 têtes de propulsion - un composant clé des munitions d’artillerie - et 239 charges d’allumage ».

Selon Müller, ces armes sont « construites et prévues pour détruire et à tuer, ou, pour reprendre les termes exacts de la définition de l’Allemagne, des objets [et] éléments ... capables ... de causer des destructions ou des dommages à des personnes ou à des biens et de servir de moyen pour faire usage de la force dans les conflits armés entre États ».

Malgré la résolution du Conseil de sécurité exigeant un cessez-le-feu immédiat, l’Allemagne continue de fournir une assistance militaire à Israël. L’Allemagne facilite ou améliore l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza.

Mais, selon Müller, « fournir de l’aide humanitaire, y compris par des largages aériens, d’une part, et livrer les armes et les équipements militaires utilisés pour les tuer et les anéantir, d’autre part, est une bien piètre justification pour les enfants, les femmes et les hommes palestiniens de Gaza, de même que pour les travailleurs humanitaires, comme l’a montré tout récemment l’attaque au missile contre les véhicules et les travailleurs de la World Central Kitchen ».

Gómez a fait remarquer l’implication des entreprises allemandes dans l’industrie militaire, lesquelles « profitent directement de la situation puisqu’elles ont vu la côte de leurs actions grimper depuis octobre et qu’elles ont considérablement multiplié les contrats de développement conjoint d’armes avec leurs homologues israéliens ».

« L’Allemagne ne semble pas être capable de faire la différence entre légitime défense et génocide ».

Dans son argumentation pour prouver que l’Allemagne facilite le génocide, le Nicaragua a également souligné que l’Allemagne avait cessé son financement de l’UNRWA à Gaza le lendemain de l’ordonnance de la CIJ du 26 janvier, « sur la base du seul avis du gouvernement israélien ».

« L’UNRWA est le plus important partenaire quand il s’agit de l’assistance à la population de la bande de Gaza », a admis le ministre fédéral allemand le 7 novembre 2023. La suspension du financement a privé l’UNRWA de 450 millions de dollars.

Des membres de la diaspora palestinienne participent à une manifestation pro-palestinienne devant l’Assemblée législative de l’Alberta, le 28 janvier 2024, à Edmonton, Alberta, Canada (Artur Widak / Nurphoto via Getty Images)

Le Nicaragua a réfuté l’argument de l’Allemagne selon lequel Israël est en situation de légitime défense.

Le Nicaragua a fait valoir qu’Israël confondait le droit de protéger son peuple avec le droit de légitime défense prévu par l’article 51 de la Charte des Nations unies, en citant l’avis consultatif rendu en 2004 par la CIJ dans l’affaire des Conséquences Juridiques de l’Edification d’un Mur dans le Territoire Palestinien Occupé.

Dans cette affaire, la Cour a estimé qu’Israël, en tant que puissance occupante, ne peut invoquer la légitime défense dans le territoire qu’il occupe. « Il est surprenant de constater que l’Allemagne ne semble pas être capable de faire la différence entre légitime défense et génocide », a déclaré Gómez.

En outre, le Nicaragua a affirmé que « le peuple palestinien a le droit à l’autodétermination », ce qui inclut « le droit de prendre les armes contre l’occupation étrangère et contre les régimes racistes dans l’exercice de leur droit à l’autodétermination tel qu’il est consacré par la Charte (des Nations unies) » et la Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États.

Gómez a fait observer que les événements du 7 octobre « ne sont pas arrivés de nulle part, sur l’impulsion du moment, sans aucune provocation ». Il a cité le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, qui le 24 octobre a déclaré : « Il est important de reconnaître que les attaques du Hamas ne venaient pas de nulle part. Le peuple palestinien subit depuis 56 ans une occupation asphyxiante ».

« Si les actions d’Israël se poursuivent sans retenue comme elles le font depuis sa naissance en tant qu’État, et s’il continue à recevoir le soutien aveugle d’États comme l’Allemagne, une nouvelle génération de Palestiniens se soulèvera à nouveau dans un avenir proche », a prédit Gómez.

Le Nicaragua demande 5 mesures provisoires

Le Nicaragua a demandé à la CIJ d’enjoindre à l’Allemagne de ne pas aggraver la situation à Gaza en « fournissant ou en autorisant la fourniture de munitions de guerre et d’autres formes de soutien direct à Israël à ce stade et en privant l’UNRWA ... de financement et de la possibilité de continuer à travailler conformément à son mandat ».

Telles sont les mesures provisoires demandées par le Nicaragua :

(1) L’Allemagne devra immédiatement suspendre son aide à Israël, en particulier son assistance militaire, dont l’équipement militaire, dans la mesure où cette aide peut être utilisée en violation de la Convention sur le génocide, du droit humanitaire international ou d’autres normes impératives du droit international général, telles que le droit du peuple palestinien à l’autodétermination et à ne pas être soumis à un régime d’apartheid ;

(2) L’Allemagne doit immédiatement mettre tout en œuvre pour s’assurer que les armes déjà livrées à Israël ne sont pas utilisées pour commettre un génocide, ne contribuent pas à des actes de génocide ou ne sont pas utilisées d’une manière qui viole le droit humanitaire international ;

Un homme tient un drapeau palestinien lors de l’inauguration de la rue Gaza en soutien au peuple palestinien, dans le centre historique de Managua, au Nicaragua, le 30 janvier 2024 (Crédit : OSWALDO RIVAS / AFP)

(3) L’Allemagne doit immédiatement faire tout ce qui est en son pouvoir pour se conformer à ses obligations en matière de droit humanitaire ;

(4) L’Allemagne doit revenir sur sa décision de suspendre le financement de l’UNRWA dans le cadre du respect de ses obligations de prévention des génocides et des actes de génocide et de la violation des droits humanitaires du peuple palestinien, ce qui inclut également l’obligation de faire tout ce qui est en son pouvoir pour garantir que l’aide humanitaire parvienne au peuple palestinien, plus particulièrement à Gaza ;

(5) L’Allemagne doit coopérer pour mettre fin aux graves violations des normes impératives du droit international en cessant son soutien à Israël, notamment s’agissant de la fourniture d’équipements militaires susceptibles d’être utilisés pour commettre des crimes graves au regard du droit international, et poursuivre son soutien à l’UNRWA, grâce auquel cette Organisation finance et organise ses activités.

L’Allemagne affirme qu’elle ne peut être tenue pour responsable puisqu’Israël ne figure pas parmi les parties prenantes dans ce dossier

L’équipe juridique de l’Allemagne a soulevé deux arguments principaux pour sa défense.

Premièrement, la CIJ n’est pas compétente dans cette affaire parce que la responsabilité de l’Allemagne dépend du constat qu’Israël est coupable de génocide et qu’Israël ne figure pas parmi les parties prenantes dans ce procès.

Deuxièmement, l’Allemagne dispose d’un « cadre juridique solide » pour évaluer au cas par cas si les licences d’exportation sont conformes à ses obligations nationales et internationales et la plupart de ses exportations depuis octobre 2023 ne sont pas des « armes de guerre ».

L’agent Tania von Uslar-Gleichen a fait valoir, au nom de l’Allemagne, que les accusations du Nicaragua « n’ont aucun fondement en fait ou en droit.

Elles dépendent d’une évaluation du comportement d’Israël, qui n’est pas une des parties de cette procédure ». Elle a déclaré que l’affaire avait été portée devant la Cour « sur la base des preuves les plus minces ».

Samuel Wordsworth, représentant également l’Allemagne, a déclaré à la CIJ que cette cour n’était pas compétente pour connaître de cette affaire. Il a expliqué qu’Israël ne comparaissait pas devant la cour et que la détermination de sa conduite était une condition préalable à l’établissement de la responsabilité de l’Allemagne.

Dans l’affaire Afrique du Sud contre Israël, la CIJ a conclu qu’il était « plausible » qu’Israël commette un génocide. Une détermination définitive sur le fond prendra plusieurs années.

Avant de déterminer si l’Allemagne enfreint ses obligations internationales, « la Cour doit d’abord déterminer qu’Israël a commis un génocide », a affirmé Wordsworth.

« La responsabilité de l’Allemagne est invoquée, mais en s’appuyant entièrement sur de prétendus actes répréhensibles d’Israël » . Par conséquent, a-t-il ajouté, Israël est « un tiers indispensable ». Anne Peters, une autre membre de l’équipe juridique de l’Allemagne, a toutefois admis que si la Cour jugeait "plausible" qu’Israël viole le droit international, elle pourrait alors déterminer si des « faits plausibles » confirment des « violations plausibles » de la part de l’Allemagne.

L’Allemagne affirme que la majeure partie de ses exportations vers Israël ne sont pas des « armes de guerre ».

Peters a déclaré que le Nicaragua n’avait présenté aucune preuve que « l’équipement militaire en provenance d’Allemagne aurait pu contribuer de manière significative à un génocide présumé ou à des violations du droit humanitaire international », compte tenu des « normes rigoureuses de l’Allemagne en matière d’octroi de licences ».

Von Uslar-Gleichen a déclaré au tribunal que depuis le 7 octobre 2023, 98% des licences accordées en Allemagne pour des exportations vers Israël ne concernaient pas des « armes de guerre », mais plutôt d’« autres équipements militaires ». Quatre-vingt pour cent du volume approuvé pour l’exportation a été autorisé en octobre 2023, a-t-elle déclaré.

Depuis octobre 2023, « nous ne voyons pas d’obus d’artillerie, pas de munitions. Presque toutes les exportations concernent ce que l’on appelle « d’autres équipements militaires », généralement de nature auxiliaire ou défensive », a-t-elle déclaré.

Il s’agit généralement d’équipements de défense contre les risques chimiques, d’équipements de protection tels que des casques ou des plaques de protection corporelle, d’équipements de communication, de peinture de camouflage et de composants, de pièces et d’autres équipements de nature secondaire.

Juges et délégués à la Cour internationale de justice à La Haye, lundi 8 avril 2024 (Piroschka Van De Wouw/Reuters)

Von Uslar-Gleichen a toutefois admis que l’Allemagne avait autorisé l’exportation d’armes de guerre vers Israël à quatre reprises au cours des six derniers mois. Deux licences pour des munitions « d’entraînement » (et non de combat), comprenant 500 000 pièces de munitions, ont été approuvées en novembre, et 1 000 pièces supplémentaires ont été approuvées au début de l’année 2024.

Une troisième licence a été approuvée pour des batteries de propulseurs dans le cadre d’un projet commun entre les industries allemande et israélienne, mais à des fins d’essai.

La quatrième licence concernait l’exportation de 3 000 armes antichars portables « dans le contexte immédiat des massacres perpétrés par le Hamas » , a-t-elle déclaré.

En 2023, Israël a demandé à l’Allemagne des munitions pour chars d’assaut, mais aucune licence n’a encore été accordée. Une licence a été accordée pour un sous-marin, mais comme il s’agit d’une « arme de guerre » qui nécessite deux licences d’exportation, elle n’a pas encore été approuvée, a déclaré Von Uslar-Gleichen à la CIJ.

Les références du Nicaragua aux obus d’artillerie et aux munitions destinées à Gaza « n’ont tout simplement aucun rapport avec la réalité. L’Allemagne les rejette », a-t-elle déclaré.

Gómez a fait valoir, au nom du Nicaragua, qu’ « il importe peu qu’un obus d’artillerie soit livré directement depuis l’Allemagne jusqu’à un char israélien qui bombarde un hôpital » ou qu’il réapprovisionne les stocks d’Israël.

« Le fait est que les garanties d’approvisionnement et de remplacement d’armements sont cruciales pour la poursuite des attaques d’Israël à Gaza », a-t-il déclaré à la CIJ, ajoutant que l’Allemagne est consciente du « risque sérieux de génocide qui est en train d’être commis ».

La procédure devant la CIJ est un outil diplomatique et un instrument de mobilisation

Bien que les États-Unis soient de loin le principal fournisseur d’armes à Israël, ils n’ont pas été poursuivis devant la CIJ parce qu’ils ne reconnaissent pas la compétence de la Cour, sauf dans les cas où le gouvernement américain y consent explicitement.

L’Allemagne reconnaît la pleine juridiction de la CIJ et constitue donc une cible plus facile que les États-Unis pour l’action en justice du Nicaragua.

Des manifestants propalestiniens devant le tribunal de La Haye, le 7 avril 2024 (Robin Van Lonkhuijsen/AFP )

« La CIJ ne va pas mettre fin à la guerre à Gaza, mais c’est un outil diplomatique que la politique étrangère utilise pour exercer une pression supplémentaire sur Israël », a déclaré au New York Times, Brian Finucane, conseiller principal à l’International Crisis Group.

« Dans la procédure du Nicaragua, elle exerce de plus une pression sur l’Allemagne. » La société civile a également intensifié ses pressions pour accompagner l’audience de la CIJ sur l’affaire Nicaragua contre l’Allemagne.

Les délégations de CODEPINK [Code Pink : Women for Peace est un groupe anti-guerre international, NdT] ont organisé des piquets de grève, des rassemblements et remis des pétitions aux missions allemandes partout aux États-Unis.

Ces initiatives s’inscrivent dans une campagne internationale de solidarité avec les Palestiniens Allemands qui risquent d’être battus et arrêtés lorsqu’ils manifestent contre la complicité de l’Allemagne dans le génocide perpétré par Israël.

La CIJ rendra une décision sur la demande de mesures provisoires du Nicaragua dans l’affaire Nicaragua v. Allemagne dans les prochaines semaines.

Marjorie Cohn Copyright © Truthout. Ne peut être reproduit sans autorisation.

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