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D’après The Lancet du 8 Novembre 2021

Covid-19 : l’immunité naturelle nous protège-t-elle des réinfections ?

Par Dr Bruno BOURGEON

mercredi 15 décembre 2021, par JMT

Covid-19 : l’immunité naturelle nous protège-t-elle des réinfections ?

Dans une lettre publiée en novembre 2021 dans le journal Lancet-infectiologie, Noah Kojima et Jeffrey D Klausner passent en revue les données disponibles jusqu’au 28 septembre 2021. Les auteurs déclarent des liens d’intérêt avec une Startup spécialisée dans les tests Covid et la mise en place de la vaccination. Leurs conflits d’intérêts seraient donc d’être plutôt pro-vaccins et pro-tests.

L’immunité au coronavirus, qu’elle soit acquise par la vaccination ou par l’infection, ne protège pas totalement ni pour toujours. © Tous droits réservés

La pandémie de SARS-CoV-2 est désormais mieux maîtrisée dans les pays où il est possible d’accéder à des tests fiables et à des vaccins efficaces. Plusieurs études ont montré que les personnes qui ont guéri d’une Covid-19 et qui ont des anticorps anti-SARS-CoV-2 (tests sérologiques) ont de faibles taux de réinfection. Des questions se posent encore sur l’importance et la durée de cette protection, comparées à celle de la vaccination.

Au travers des études publiées jusqu’au 28 septembre 2021, études biologiques bien conduites montrant l’existence d’une immunité protectrice après infection par le SARS-CoV-2 ; au travers de plusieurs études épidémiologiques et cliniques, y compris des études menées au cours de la période récente de transmission de mutants à prédominance delta (B.1.617.2), le risque d’infections successives par le Sars-CoV-2 diminue de 80,5 à 100% chez ceux qui ont contracté la Covid-19. Les études sont de grande envergure et ubiquitaires.

Une autre étude sur résultats de laboratoire a analysé les tests de 9119 sujets ayant un antécédent de Covid-19 (du 1er décembre 2019 au 13 novembre 2020) : seulement 0,7% d’entre eux ont été réinfectés (11).

Dans une étude de la Cleveland Clinic (Ohio, USA), 4,3% des sujets indemnes ont contracté la Covid-19 pendant le suivi, alors que le taux de réinfection était de 0% chez ceux qui avaient déjà été infectés avant le suivi (6).

Une étude autrichienne révèle que la fréquence des hospitalisations dues à une nouvelle infection par le Sars-Cov-2 est 0,03% (5/14 840) et celle des décès liés à une nouvelle infection est 0,01% (1/14 840) personnes (4).

En raison du faible risque de réinfection chez les sujets préalablement infectés, et de la possibilité de détecter une ancienne infection par des tests biologiques (12), les médecins devraient informer les patients guéris d’une Covid-19 de la probabilité de réinfection et inscrire cet antécédent dans les dossiers médicaux.

Preuves biologiques, épidémiologiques et cliniques qu’une infection antérieure au Covid-19 réduit le risque de réinfection

Études biologiques
Dan et al (2021) (1) : environ 95% des participants ont conservé une mémoire immunitaire environ 6 mois après avoir contracté la Covid-19 ; plus de 90 % des participants possédaient des cellules T CD4+ mémoire de 1 mois et jusqu’à 6 à 8 mois après avoir contracté la maladie.
Wang et al (2021) (2) : Les participants ayant été infectés par les premiers virus SARS-CoV-2 produisent des anticorps qui neutralisent efficacement les mutants émergents préoccupants.

Études épidémiologiques
Hansen et al (2021) (3) : Dans une étude observationnelle sur la population danoise, les sujets qui avaient déjà eu la Covid-19 étaient protégés à environ 80,5% contre la réinfection
Pilz et al (2021) (4) : Dans une étude observationnelle rétrospective utilisant les données nationales autrichiennes sur l’infection par le Sars-CoV-2, les sujets qui avaient déjà contracté la Covid-19 étaient protégées à environ 91% contre la réinfection
Sheehan et al (2021) (5) : Dans une étude de cohorte rétrospective aux États-Unis, les sujets qui avaient déjà eu la Covid-19 étaient protégés à 81,8% contre la réinfection
Shrestha et al (2021) (6) : Dans une étude de cohorte rétrospective aux États-Unis, les personnes qui avaient déjà eu la Covid-19 étaient protégées à 100% contre la réinfection
Gazit et al (2021) (7) : Dans une étude observationnelle rétrospective en Israël, les vaccinés n’ayant jamais été préalablement infectés par le Sars-CoV-2 présentaient un risque 13,06 fois plus élevé d’être infectés par la variante delta (B.1.617.2), que ceux qui avait eu la Covid-19 précédemment ; dans cette étude des preuves de la diminution de l’immunité naturelle ont également été mises en évidence.
Kojima et al (2021) (8) : Dans une cohorte observationnelle rétrospective du personnel de laboratoire dépisté pour le Sars-CoV-2, les personnes ayant déjà eu la Covid-19 sont protégées à 100% contre la réinfection

Etudes cliniques
Hall et al (2021) (9) : dans une vaste étude de cohorte prospective multicentrique, le fait d’avoir déjà contracté le virus Sars-Cov-2 était associé à une diminution de 84% du risque d’infection
Letizia et al (2021) (10) : dans une cohorte prospective chez des Marines américains, les jeunes adultes séropositifs étaient protégés à 82% contre la réinfection.

Bien que ces études montrent que la protection contre la réinfection est forte et persiste pendant plus de 10 mois de suivi (3), on ne sait pas combien de temps l’immunité protectrice durera vraiment. De nombreuses infections virales, telles que la rougeole, confèrent une immunité à long terme, voire à vie, alors que ce n’est pas le cas pour d’autres, comme la grippe (en raison de modifications dans la génétique virale) (4).

Nous sommes limités par les données actuelles pour évaluer avec certitude la durée de l’immunité conférée par une infection précédente par le Sars-CoV-2. De manière encourageante, les auteurs d’une étude menée auprès de personnes guéries qui avaient présenté une infection au Sars-CoV-2 ont rapporté que cette infection induisait chez l’homme une mémoire immunitaire humorale robuste et spécifique du Sars-CoV2 (13).

Or la présence d’anticorps n’est qu’un des marqueurs de l’immunité. Après vaccination ou infection, l’immunité fait appel à de nombreux mécanismes au sein d’un individu : humorale (anticorps), mais également cellulaire (14, 15, 16) ; nous savons que l’infection par le Sars-CoV-2 induit une immunité spécifique et durable des cellules T, qui possèdent plusieurs empreintes des protéines Spike du Sars-CoV-2 ainsi que les empreintes d’autres protéines, comme les nucléocapsides. La grande diversité de la reconnaissance virale des lymphocytes T permet d’améliorer la protection contre les mutants du Sars-CoV-2 (15), avec reconnaissance des mutants alpha (B.1.1.7), bêta (B.1.351) et gamma (P.1) (17).

Les chercheurs ont également découvert que les cellules T mémoire des personnes qui se sont rétablies d’une infection par le Sars-CoV-1 en 2002-2003 restent réactives aux protéines du Sars-CoV1, 17 ans après cette épidémie (15). De plus, une réponse des cellules B (celles qui fabriquent les anticorps) mémoire au Sars-CoV2 se développe entre 1,3 et 6,2 mois après l’infection, en cohérence avec une protection à plus long terme (18).

Certains sujets rétablis de la Covid-19 pourraient ne pas tirer bénéfice d’une vaccination ultérieure (19). Une étude a révélé qu’un antécédent de Covid-19 était associé à une augmentation des effets indésirables après vaccination avec le vaccin à ARNm Comirnaty BNT162b2 (Pfizer-BioNTech) (20). De plus, des effets indésirables rares mais graves faisant suite à la vaccination Covid-19 ont été rapportés (21).

En Suisse, les résidents rétablis d’une infection au Sars-CoV2 au cours des 12 derniers mois sont considérés comme étant aussi bien protégés que ceux qui ont été complètement vaccinés (22).

Bien que des études de suivi à plus long terme soient nécessaires, les cliniciens doivent rester optimistes sur l’effet protecteur de la guérison après une infection Covid-19 antérieure. L’immunité de groupe pour contrôler l’épidémie de Sars-CoV-2 peut être atteinte par l’immunité acquise après une infection antérieure ou une vaccination. L’immunité acquise par la vaccination est-elle plus sûre ? Nous n’en savons rien. Toutefois, compte-tenu des preuves concernant l’immunité induite par une infection Covid-19 antérieure, les décideurs politiques devraient prendre en compte le fait qu’un antécédent de Covid-19 guéri confère une immunité au moins équivalente à la vaccination, notamment pour l’accès aux espaces publics ou professionnels et les voyages.

Ainsi l’immunité qui fait suite à une infection par le Sars-CoV-2 vaut largement celle apportée par une double vaccination (nous n’avons pas de comparaison pour l’instant avec la 3e injection) et dure au moins 12 mois. Pour ce qui est de la contagiosité, nous n’avons pas non plus d’éléments permettant de penser qu’un sujet précédemment infecté risque plus de transmettre la maladie en cas de réinfection qu’un sujet vacciné.

Il est donc absurde et injuste (et même, comme le disent les auteurs, dangereux chez les jeunes) d’exiger un rappel vaccinal chez ceux qui peuvent apporter la preuve qu’ils ont été infectés il y a moins de 12 mois. Rien de surprenant : hors maladies virales chroniques (hépatite B, C, HIV, Papillomavirus), il n’y a pas de virose qui confère une immunité inférieure au vaccin. Celle-ci est même définitive lorsque le virus ne mute pas (rougeole).

Reste le problème, comme dans la grippe, des virus qui mutent ou se recombinent en permanence, et finissent par échapper à l’immunité constituée lors de l’infection précédente lorsqu’ils deviennent trop différents du virus initial. Cela risque d’arriver avec le Sars-CoV-2. Soit nous devrons tous nous revacciner régulièrement, soit nous devrons accepter une maladie endémique responsable de quelques centaines de décès annuels, essentiellement chez les vieillards, comme pour la grippe. Ce que je pressens.

Pour les auteurs, le but de leur travail n’est pas de montrer une éventuelle supériorité de l’immunité naturelle sur l’immunité vaccinale, mais de convaincre les médecins et les décideurs de ne pas considérer l’immunité naturelle comme non protectrice. Et de réfléchir avant d’imposer à des sujets antérieurement infectés une vaccination qui pourrait les exposer à plus de risques que de bénéfices. Surtout pour les moins de 40 ans, car l’étude israélienne (7) montre qu’une vaccination après une infection procure un surcroît d’immunité, possiblement utile chez les sujets les plus âgés, d’ailleurs peu concernés par la myocardite vaccinale.

Dr Bruno Bourgeon, http://aid97400.re

1. Mémoire immunologique au SRAS-CoV-2 évaluée jusqu’à 8 mois après l’infection.
Science. 2021 ; 371 eabf4063
2. Anticorps ultra-puissants contre des variantes diverses et hautement transmissibles du SARS-CoV-2.
Science. 2021 ; 373 eabh1766
3. Évaluation de la protection contre la réinfection par le SRAS-CoV-2 chez 4 millions d’individus testés par PCR au Danemark en 2020 : une étude observationnelle au niveau de la population.
Lancette. 2021 ; 397 : 1204-1212
4. Risque de réinfection par le SRAS-CoV-2 en Autriche.
Eur J Clin Invest. 2021 ; 51 e13520
5. Taux de réinfection chez les patients précédemment testés positifs pour COVID-19 : une étude de cohorte rétrospective.
Clin Infect Dis. 2021. Publié en ligne le 15 mars.
https://doi.org/10.1093/cid/ciab234
6. Nécessité de la vaccination COVID-19 chez les personnes précédemment infectées.
medRxiv. 2021. Publié en ligne le 19 juin (pré-impression).
https://doi.org/10.1101/2021.06.01.21258176
7. Comparaison de l’immunité naturelle du SRAS-CoV-2 à l’immunité induite par le vaccin : réinfections versus infections.
medRxiv. 2021. Publié en ligne le 25 août (pré-impression).
https://doi.org/10.1101/2021.08.24.21262415
8. Incidence de l’infection au coronavirus-2 du syndrome respiratoire aigu sévère chez les employés précédemment infectés ou vaccinés.
medRxiv. 2021. Publié en ligne le 8 juillet (pré-impression).
https://doi.org/10.1101/2021.07.03.21259976
9. Taux d’infection par le SRAS-CoV-2 des anticorps positifs par rapport aux travailleurs de la santé anticorps négatifs en Angleterre : une vaste étude de cohorte prospective multicentrique (SIREN).
Lancette. 2021 ; 397 : 1459-1469
10. Séropositivité au SRAS-CoV-2 et risque d’infection subséquente chez les jeunes adultes en bonne santé : une étude de cohorte prospective.
Lancet Respir Med. 2021 ; 9 : 712-720
11. Réinfection par le SRAS-CoV-2 chez des patients subissant des tests de laboratoire en série.
Clin Infect Dis. 2021. Publié en ligne le 25 avril
https://doi.org/10.1093/cid/ciab345
12. Réponses distinctes des anticorps et des cellules B mémoire chez les individus naïfs et récupérés du SRAS-CoV-2 après la vaccination par l’ARNm.
Sci Immunol. 2021 ; 6 eabi6950
13. L’infection par le SRAS-CoV-2 induit des cellules plasmatiques de la moelle osseuse à longue durée de vie chez l’homme.
La nature. 2021 ; 595 : 421-425
14. Covid-19 : est-ce que beaucoup de gens ont une immunité préexistante ?.
BMJ. 2020 ; 370 m3563
15. Immunité des cellules T spécifique au SRAS-CoV-2 en cas de COVID-19 et de SRAS, et contrôles non infectés.
La nature. 2020 ; 584 : 457-462
16. Réponse des lymphocytes T à l’infection par le SRAS-CoV-2 chez l’homme : une revue systématique.
PLoS One. 2021 ; 16 e0245532
17. Les réponses des lymphocytes T CD8+ chez les personnes convalescentes COVID-19 ciblent les épitopes conservés de plusieurs variantes circulantes importantes du SRAS-CoV-2.
Forum ouvert Infect Dis. 2021 ; 8 surab143
18. Évolution de l’immunité des anticorps contre le SRAS-CoV-2.
La nature. 2021 ; 591 : 639-644
19. La protection contre une infection antérieure par le SRAS-CoV-2 est similaire à celle de la protection vaccinale BNT162b2 : une expérience nationale de trois mois en Israël.
medRxiv. 2021. Publié en ligne le 24 avril (pré-impression).
https://doi.org/10.1101/2021.04.20.21255670
20. Une infection précédente au COVID-19, mais pas un COVID-19 long, est associée à une augmentation des événements indésirables après la vaccination BNT162b2/Pfizer.
J Infecter. 2021 ; 83 : 381-412
21. Événements indésirables sélectionnés signalés après la vaccination contre le COVID-19.
https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-ncov/vaccines/safety/adverse-events.html
22. La Suisse prévoit de prolonger l’exigence de certificat COVID jusqu’à la mi-novembre.
https://www.schengenvisainfo.com/news/switzerland-plans-to-extend-covid-certificate-requirement-until-mid-november/

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