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D’après Notre-Planète.Info du 13 Octobre 2021

La fonte inouie de la glace arctique

Par Bruno Bourgeon

jeudi 21 octobre 2021, par JMT

La fonte inouie de la glace arctique

Etendue de la banquise arctique le 13 septembre 2013 (maximum annuel). La ligne jaune correspond à la superficie moyenne sur 30 ansAuteur : NASA / Goddard Space Flight Center Scientific Visualization Studio / AMSR2 / Japan Aerospace Exploration Agency - Licence : DR

L’océan arctique est habituellement dominé par la glace de mer qui s’accumule à chaque saison. Son épaisseur et son étendue varient. Les mesures satellitaires de plus en plus précises et multicritères montrent que la banquise arctique fond à vitesse élevée, suivant une tendance lourde. Dans quelques années, elle ne sera plus.

Un témoin évident du réchauffement climatique est sans doute la fonte impressionnante de la banquise arctique : « La couverture de glace de mer de l’Arctique continue de décroître et cela est lié au réchauffement continu de l’Arctique », a déclaré Claire Parkinson , chercheure principale en climatologie au Goddard Space Flight Center de la NASA à Greenbelt, Maryland . Il s’agit d’une boucle de rétroaction positive : « le réchauffement signifie moins de glace et plus de glace va fondre, mais aussi, parce qu’il y a moins de glace, moins de rayonnement solaire incident est réfléchi, ce qui contribue au réchauffement », ajoute-t-elle. Ce qu’on appelle l’albédo.

Chaque année, la couverture de glace de mer recouvrant l’océan Arctique et les mers environnantes s’épaissit et s’étend pendant l’automne et l’hiver, atteignant son maximum annuel entre fin février et début avril. Puis, la glace fond en partie au printemps et en été jusqu’à ce qu’elle atteigne son minimum annuel en septembre. Ainsi, deux mois sont particulièrement significatifs : septembre, à la fin de l’été lorsque la banquise atteint sa superficie minimale, et mars à la fin de l’hiver, lorsque la banquise atteint sa superficie maximale.

La superficie de la banquise est mesurée avec précision depuis 1979, date du début des mesures satellitaires. Elles dégagent une tendance sur l’évolution ou la régression de la banquise arctique. Depuis 40 ans, les données enregistrées montrent un déclin structurel impressionnant, sans équivoque :

  • Selon la NASA, depuis les années 1990, l’Arctique se réchauffe deux fois plus vite que la moyenne planétaire. Ce phénomène est appelé « amplification de l’Arctique ».
  • Selon les analyses et données du National Snow and Ice Data Center (NSIDC, Université du Colorado à Boulder) en partenariat avec la NASA, depuis l’an 2000, la situation se détériore nettement.
  • Entre les années 1980 et les années 2010, le minimum d’extension « moyen » est passé d’environ 7 millions de km2 (moyenne sur 1979/1990), à environ 4,5 millions de km² (en moyenne sur 2011/2018), en baisse constante sur les dernières décennies.

Si l’on considère l’étendue maximale de la glace de mer en mars, la situation est comparable : les dernières années confirment que la banquise arctique fond dramatiquement. Sa superficie diminue chaque année en moyenne de 47 800 km2. En seulement 30 ans, l’étendue de la glace arctique a diminué de près de 45 % en septembre... Pire : cette situation est « sans précédent depuis au moins mille ans », écrivait le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) dans son rapport sur les océans et la cryosphère (09/2019) .

Il est aussi intéressant de considérer l’âge de la glace. En effet, une glace plus vieille a tendance à être épaissie et donc plus résistante aux aléas qui peuvent l’affecter. Selon le NSIDC, en 2019, seulement 1 % de la couverture de glace de mer était constituée de glace datant d’au moins 4 ans, contre 33 % en 1984. Aujourd’hui, 2/3 de la glace qui forme la banquise a moins d’un an. La banquise jeune et mince fond plus rapidement.

L’épaisseur de la glace est également un très bon indicateur : cette information est maintenant disponible grâce au satellite CryoSat-2 , depuis 2011. CryoSat-2 mesure la hauteur de la banquise au-dessus de la ligne de flottaison, ce que l’on appelle le « franc-bord », afin d’en déduire son épaisseur.

La glace peut atteindre un mètre d’épaisseur chaque hiver, et si elle survit à un ou plusieurs étés, elle peut même atteindre plusieurs mètres. De plus, au gré des courants marins, la glace flottante parcourt de grandes distances et finit par s’accumuler le long du Groenland et des îles canadiennes pour former des couches de 10 mètres d’épaisseur.

En février 2018, une vaste zone d’eau libre est apparue dans la banquise au nord du Groenland, à l’intérieur de la banquise pluriannuelle, la glace la plus ancienne et la plus épaisse de l’Arctique. Si la majeure partie de celle-ci a ensuite gelé de nouveau, elle s’est fragilisée. « Cela pourrait rendre la glace dans cette région plus mobile et susceptible de sortir de l’Arctique cet été, soit dans les détroits de Fram ou de Nares, pour finalement fondre dans les eaux plus chaudes de l’océan Atlantique », explique la NASA.

Si l’inlandsis groenlandais a été stable de septembre à décembre 2017, il s’agit d’une exception dans la tendance générale constatée depuis deux décennies, il a en effet perdu environ 3 600 milliards de tonnes de glace depuis 2002. Autrement dit, 3 900 milliards de litres d’eau ont rejoint les océans : 40 fois le volume d’eau du lac Léman.

En 1979, pour le mois d’octobre, le volume de glace de mer en arctique était d’environ 17 000 km3, contre seulement 4 000 km3 en octobre 2020, une baisse de 325 % ! A ce rythme,la banquise arctique pourrait avoir disparu en septembre 2054 selon des estimations de l’Université de l’état de New York à Albany.

Une autre étude publiée en octobre 2021 dans Earth Future s’intéresse à une région d’un million de km2 située entre le nord du Groenland et les côtes de l’archipel canadien, où la glace de mer est la plus épaisse et donc la plus résistante tout au long de l’année. Selon les scénarios de réchauffement climatique, d’ici 2050, la glace estivale dans cette région s’amincira considérablement.

Dans le scénario optimiste, si les émissions de carbone peuvent être réduites, une partie de la glace estivale pourrait persister indéfiniment. Cependant, dans le scénario pessimiste, où les émissions de GES continuent sur leur trajectoire actuelle, la glace estivale disparaîtrait d’ici 2100, ainsi que tout un écosystème qui en profitait comme les ours polaires et les phoques.

Les conséquences de la diminution de la banquise arctique sont nombreuses et potentiellement majeures :

L’Arctique sans banquise devrait avoir des conséquences significatives sur les écosystèmes océaniques, les rétroactions biogéochimiques, les conditions météorologiques extrêmes et le climat dans les moyennes et hautes latitudes. Cela affectera également les activités maritimes et commerciales de l’Arctique, y compris l’expédition, le transport et l’exploration de l’énergie, engendrant des bouleversements majeurs mais aussi des opportunités commerciales et stratégiques. Ce qui n’a pas échappé aux grandes puissances déjà lancées dans cette course folle depuis quelques années..

Bruno Bourgeon, AID, http://aid97400.re

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