AID Association Initiatives Dionysiennes

Ouv zot zié !

Accueil > Ecologie > Médecine > Par-delà la Santé : l’Amour

Un peu de philosophie

Par-delà la Santé : l’Amour

Par Bruno Bourgeon

mercredi 29 septembre 2021, par JMT

Par-delà la Santé : l’Amour

Il n’y a pas d’Histoire sans Amour. Pour être un sentiment historique, l’Amour n’en est pas moins une donnée constitutive de notre humanité. Mais il a plusieurs visages et les formes qu’il prend sont au nombre de trois, selon Platon (« Le Banquet »).

« Eros » le lie au manque ; « Philia » à la joie, ainsi que le voyaient Aristote (« aimer, c’est se réjouir ») ou Spinoza ; « Agapê » à la charité. C’est-à-dire la Chrétienté. Saint-Augustin : « aime et fais ce que tu veux », définissant ainsi le comportement vertueux dès lors que mu par le sentiment d’amour charitable. Et faisant ainsi de l’Amour la vertu supérieure : dans son « Petit Traité des Grandes Vertus », André Comte-Sponville place l’Amour comme la plus grande des vertus, si grande même qu’elle dépasse la Morale.

Platon d’après Raphaël in « L’Ecole d’Athènes » Vatican

Tout ceci pour situer l’Amour comme valeur, vertu, alors que notre société « panmédicale » idéologise la Santé comme valeur suprême. Or la Santé n’est pas la valeur suprême.

Sur les frontons de nos mairies, il est écrit : « Liberté, Egalité, Fraternité ». Pas : « Santé, Egalité, Fraternité ».

La Santé n’est pas une valeur suprême. Et ce n’est même pas une valeur. C’est un bien. Une valeur est estimable, admirable. Un bien est désirable, enviable. Santé et Richesse sont des biens. Courage, Justice, Amour, sont des valeurs. Si vous dites à quelqu’un : « j’admire votre santé », vous serez pris pour un parfait imbécile. Et d’ailleurs si nous apprenons à nos enfants le sens de la vie, ce n’est pas protéger notre santé ou la santé de nos aïeux.

Or donc, l’Amour. Et c’est vrai. En quoi tomber amoureux serait-il une mauvaise chose ? On aime une équipe de foot, le cinéma, la musique, les endroits des vacances, les parcs d’attraction, son chien, une pizza, les musées, un mug personnalisé… Les gens aiment tout, autour d’eux : qu’y a-t-il de mal à cela ?

Le problème est ce que l’on fait de l’Amour. Comment l’interprète-t-on ? Tous les sentiments qui résultent de l’Amour ne sont que le reflet indirect de ce que nous, Humains, projetons sur lui. Si ces émotions deviennent un obstacle, là encore, ce n’est qu’une projection de notre esprit qui interagit, avec ses difficultés, ses problèmes.

Nous ne savons pas gérer cela, à cause de la confusion qu’apporte notre moralité. Nous avons ces définitions bornées de l’Amour : de ce qu’il sous-entend, de la valeur que nous lui donnons. Nous décidons de ce qui est bon ou mauvais. Nous adoptons, parce que nous croyons l’aimer, les préférences de notre partenaire. Nous suivons les traditions des parents, les règles de la société. Jusqu’à ce que cet amalgame nous conduise à cette vision triste et sommaire de ce que nous croyons être l’Amour.

Avez-vous observé un tableau sans prendre conscience que vous ne cligniez plus des yeux ? Quel est le goût de votre glace préférée un jour où il fait vraiment très chaud ? Que savez-vous de la brise qui vous invite à ne pas vous lever le matin ? Pourquoi oublier de manger lorsque la passion d’une activité vous dévore ? Faites-vous attention au fait que vos enfants vous prennent la main pour traverser la rue ? Quelle que soit votre définition de l’Amour, il va bien au-delà. Remettez-vous en à vos souvenirs, et multipliez-les par autant de fois où vous avez fait sourire quelqu’un : c’est là votre potentiel.

Pardonnons-nous cette ignorance qui nous aveugle face à ces menues observations de la vie. Mais nous devrions avoir honte de faire de quelque chose de si pur et beau quelque chose d’aussi compliqué, pour le faire correspondre à l’idée que nous en avons. Nous devrions avoir honte de remodeler la vie et le miracle de son essence, et de les renfermer dans quelque moule, parce que cela nous semble approprié.

Car « aimer », ce n’est pas seulement attendre de l’Autre qu’il vous comble, c’est aussi savoir « exister un peu moins », ne pas s’imposer à l’Autre, savoir se retirer, pour permettre à ses enfants, par exemple, d’exister un peu plus. Car les enfants, c’est comme l’eau : ça occupe toute la place disponible. Et non, je ne fais pas de pizzas, de mugs personnalisés, et ne suis pas conservateur de musée.

Bruno Bourgeon www.aid97400.re

Version imprimable :

PUBLICATIONS

* Courrier des lecteurs Zinfos974 du Mercredi 29 Septembre 2021 à 14:19

* Courrier des lecteurs d’Imaz-Press Réunion du

* Courrier des lecteurs de Témoignages du

* Tribune libre de Clicanoo.re du

* Courrier des lecteurs du Quotidien du Lundi 4 octobre 2021, 7h55