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Rapport du Giec ou Tirole-Blanchard ?

Il n’y a pas de vaccin contre le dérèglement climatique

Par Bruno Bourgeon, porte-parole d’AID

mercredi 7 juillet 2021, par JMT

Il n’y a pas de vaccin contre le dérèglement climatique

Alors que les températures dans l’ouest des États-Unis et du Canada frôlent les 50°C, prend-on vraiment la mesure du dérèglement climatique, ou verse-t-on maintenant dans une forme de climato-optimisme ?

Le 23 juin, l’AFP révélait, en citant le pré-rapport du GIEC fuité, la hausse des températures et du niveau des mers, la disparition probable de certaines espèces, la possibilité de la fonte des calottes glaciaires, ou la disparition de la forêt amazonienne.

50°C au Canada

Sur LCI, la journaliste du Point Géraldine Woessner imputait la fuite aux "décroissancistes". Qui a fait fuiter ? "On sait qu’elle [la fuite] vient de France, c’est ce que l’enquête interne du Giec a établi", répond François Gemenne, l’un des auteurs du pré-rapport, issu du "groupe II", chargé d’évaluer les conséquences géopolitiques et sociales des modélisations du climat établies par le "groupe I", composé de scientifiques du climat, entre autres.

Fallait-il le diffuser ? Les chercheurs du Giec, dont François Gemenne, ont vivement protesté, refusant de le commenter auprès des médias qui les sollicitaient.

Une position approuvée par certains journalistes scientifiques alors que les fuites de pré-rapports du Giec se produisent à intervalles réguliers depuis 25 ans. Ces journalistes estiment en effet que cette pratique, du moins avec des rapports encore très loin de leur état final, fait prendre le risque de diffuser de fausses informations et de décrédibiliser les travaux du Giec, dont chaque terme est pesé scientifiquement.

Cela avait été le cas lors d’une fuite du pré-rapport du "groupe I" en 2013, lorsque des climato-sceptiques avaient dénoncé des modèles alarmistes par rapport à la réalité, alors que dans le rapport final de 2014, les températures recalibrées correctement ne faisaient plus mentir les modèles.

La fuite relancerait la prise de conscience du réchauffement climatique.Y compris en publiant des éléments faux, ou alarmistes ? Car parmi les nombreuses phrases inquiétantes du pré-rapport, Gemenne a tiqué sur celle-ci :"La vie sur terre peut se remettre d’un changement climatique majeur en évoluant vers de nouvelles espèces et en créant de nouveaux écosystèmes. L’humanité ne le peut pas." Le chercheur s’explique, en signalant que c’est avant tout une phrase militante qui cherche à faire du plaidoyer plutôt que de la science.

Faut-il y voir une apocalypse ? La peur serait-elle un outil efficace ? Le changement climatique apparaît souvent aux gens comme quelque chose qui va se produire très loin d’eux, et dans un temps lointain. Cependant,93 % des Européens pensent que la question climatique est majeure. Du côté des médias, les magazines scientifiques évoquaient les conséquences du dérèglement climatique il y a déjà 15 ans.

La question climatique est-elle traitée à hauteur de l’enjeu, par exemple concernant les images de la méga-canicule (soit au moins six jours consécutifs de températures maximales supérieures à 30°C) du nord-ouest américain : images vacancières de baignades, bronzing, et enfants qui jouent dans l’eau ? Les conséquences dramatiques du dôme de chaleur est en contradiction directe avec les images diffusées.

Quelques jours plus tôt, Géraldine Woessner relativisait le "cataclysme", car "seules" 80 millions de victimes seraient concernées, sur 7 milliards d’habitants. Il est donc temps de se pencher sur les conséquences différenciées du dérèglement climatique. "Un défi scientifique considérable, et une prochaine avancée des rapports du Giec, c’est la déclinaison régionale des modèles climatiques", confirme Gemenne.

Au risque que certains pays s’impliquent moins, faute de conséquences néfastes pour eux ? Les régions les moins touchées, telles que l’Amérique du Nord, l’Europe ou le nord-est asiatique, sont aussi aujourd’hui les plus émettrices de gaz à effet de serre.

Ces pays aujourd’hui n’ont guère intérêt à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, parce que ça va leur demander des efforts parfois considérables, et que les impacts ne vont pas se matérialiser chez eux en premier, mais chez d’autres pays qui portent, eux, une responsabilité infinitésimale dans le changement climatique.

Victime de la canicule entre deux sauveteurs

Certains prétendent qu’on a les moyens d’agir, par l’ingénierie. On ne voit quasiment plus de climato-sceptiques dans les médias, mais se développe une sorte de climato-optimisme technologique. C’est un terrible mélange de discours, dire que l’homme s’est toujours adapté renvoie implicitement à l’homme préhistorique qui a traversé l’épisode glaciaire. (...) L’homme s’est adapté [mais] sur des milliers, des dizaines de milliers d’années !"

L’adaptation, c’est l’ensemble des stratégies à mettre en œuvre pour essayer d’atténuer les impacts des changements climatiques pour la population, et ce n’est pas contradictoire avec la logique de réduire les émissions de gaz à effet de serre, qu’on appelle l’atténuation. Dans les négociations internationales, l’adaptation a été un grand tabou, car les gens se disaient : attention, s’il y a moyen de s’adapter, on ne va pas réduire les émissions.

Comment agir ? Toucher au portefeuille, notamment à propos de l’extraction des combustibles fossiles. Mais aussi à propos, par exemple, du béton et du ciment, qui représentent 8 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Et il n’y aura pas de vaccin contre le changement climatique, les températures et le niveau des mers ne vont pas baisser. Ce n’est pas une crise climatique, car le processus est irréversible.

Peut-on ne pas envisager des régimes autoritaires écologistes tout en les estimant peut-être nécessaires pour atteindre les objectifs fixés ? Le changement climatique doit sortir du seul débat scientifique dans lequel il est longtemps resté, et prendre pleinement sa place au sein des débats médiatiques et politiques.

Sauf que le sujet n’intéresse pas les journalistes politiques, car il leur faudrait notamment lire les rapports du Giec. Et les journalistes économiques ? Sur BFMTV, cette semaine, les informations terrifiantes venues de Lytton, épicentre de la super-canicule au Canada, s’enchaînent avec la chronique économique, joyeuse, dédiée aux soldes. Comme un témoin de l’incohérence entre inquiétudes climatiques et encouragements au redémarrage de la croissance.

Le rapport Tirole-Blanchard (commandé par Emmanuel Macron et rendu public fin juin) note que le dérèglement climatique est un "risque existentiel", tout en récoltant de vives critiques pour sa non-remise en cause du modèle fondé sur la croissance.

"Les économistes aujourd’hui ont le même problème que les journalistes politiques, qui eux-même ont le même problème que la plupart des dirigeants", analyse Gemenne. "Ils ont reçu une formation dans laquelle les questions d’environnement sont considérées comme pas importantes."

Il note d’ailleurs que les formations économiques ou de l’ENA n’incluaient le sujet climatique et environnemental qu’à la marge, jusqu’à récemment. La lutte contre le réchauffement climatique va se jouer dans des pays auxquels on s’intéresse peu, en Inde, au Brésil, en Afrique. Nous devons faire des efforts avec les pays pauvres ou en voie de développement pour que leur trajectoire ne soit pas carbonée. Cela peut paraître injuste mais exigera des transferts technologiques et financiers.

Seule méthode pour s’en sortir par le haut, tout en continuant la décroissance carbonée dans les pays développés.

Bruno Bourgeon, porte-parole d’AID
D’après @si

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