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Traduction d’AID pour Les-crises.fr n° 2019-132

Noam Chomsky : " Nous sommes actuellement confrontés à une crise constitutionnelle "

par Ilana Novick, traduit par Jocelyne le Boulicaut

jeudi 28 novembre 2019, par JMT

AID soutient financièrement le très intéressant site "Les-crises.fr" depuis plusieurs années. Nous avons fait un pas de plus en participant aux traductions des textes anglais quand le site fait appel à la solidarité de ses adhérents. Nous avons donc mandaté une de nos adhérentes, Jocelyne LE BOULICAUT enseignante universitaire d’anglais retraitée pour y participer en notre nom et nous indemnisons son temps passé avec notre monnaie interne

Noam Chomsky : " Nous sommes actuellement confrontés à une crise constitutionnelle ".

4 Novembre 2019 par Ilana Novick

Noam Chomsky par Hatem Moussa / AP

Noam Chomsky peut bien avoir 91 ans, mais l’homme que Mehdi Hasan de The Intercept qualifie d’"auteur vivant le plus cité" ne risque pas de se calmer. En tant que linguiste et militant, Chomsky s’élève contre l’impérialisme américain et se prononce en faveur des causes de gauche depuis les années 1960.

Bien qu’il continue de le faire sous l’administration Trump, cela ne signifie pas que ses opinions peuvent être catégorisées - il est aussi critique envers les Démocrates qui ne contrent pas le président Donald Trump et n’exigent pas des politiques progressistes qu’il l’est envers les Républicains qui soutiennent sa présidence.

Et bien que Chomsky s’intéresse depuis longtemps à ces enjeux, ce recul lui permet d’être nuancé, voire, à l’occasion de changer d’avis. Sur le podcast Deconstructed, il s’est entretenu avec Hasan sur divers sujets comme le retrait des troupes américaines de Syrie, les chances que Trump soit effectivement destitué, la radicalisation du Parti républicain, Bernie Sanders etc.

En ce qui concerne la Syrie, Chomsky s’oppose à la décision de Trump de retirer les troupes américaines. Comme il l’a expliqué à Hasan, "un petit contingent américain ayant pour seule mission de dissuader une invasion turque planifiée, ce qui était évident, ce n’est pas de l’impérialisme". Bien au contraire, poursuit-il, " c’est protéger les Kurdes de toute aggravation des atrocités et des massacres qu’ Erdogan a perpétrés en Turquie même mais aussi dans les régions de Syrie qu’il a déjà conquises".

Sur la question de la destitution, Chomsky est irrité par le fait qu’il ait fallu que Trump demande à l’Ukraine d’enquêter sur les Biden pour que les Démocrates en viennent à songer à la destitution. "Nous sommes en fait confrontés à une crise constitutionnelle " a expliqué. Chomsky au sujet du moment politique que nous traversons actuellement.

Cependant, "ils s’attaquent à Trump non pas en vertu de ses crimes majeurs, mais parce qu’il s’en est pris à un Démocrate de premier plan", souligne-t-il, avant de faire le lien avec Richard Nixon, demandant "Cela vous rappelle-t- il quelque chose ? Oui. Le Watergate. Ils n’ont pas poursuivi Nixon pour ses crimes majeurs. Ces derniers étaient officieux. C’était parce qu’il avait attaqué le Parti Démocrate."

Chomsky doute également que l’enquête aboutisse effectivement à la destitution de Trump. Si elle a un effet, explique-t-il, ça sera surtout de renforcer son assise populaire.

Ce qui va se passer, c’est que la Chambre des Représentants votera la destitution et ça passera au Sénat. Les sénateurs Républicains sont complètement cinglés. Ils sont terrorisés par la base électorale de Trump. Donc ils rejetteront la demande de destitution. Trump aura beau jeu de dire qu’il a été blanchi et que c’était l’Etat profond et les traîtres Démocrates qui essayaient de renverser le résultat des élections. Oh, votez pour moi ! [L’État profond, transcription de l’américain deep state, est un concept politique qui désigne, au sein d’un État ou de sa bureaucratie, une hiérarchie parallèle, une ligue, ou une entité informelle qui détient secrètement le pouvoir décisionnel, manipulant ainsi l’État de droit, NdT]

Il pense également que la direction actuelle du Parti Républicain ne devrait pas être une surprise :

Cela fait partie du problème du Parti Républicain. Ses deux assises - celles dont il sert les intérêts - sont les ultra-riches et le pouvoir des entreprises.

Dans les faits, le pays est de plus en plus aux mains d’un très petit groupe d’électeurs - environ 20 % du corps électoral - qui sont blancs, souvent nationalistes, chrétiens, souvent évangéliques, traditionalistes, âgés, peu éduqués et ruraux et sont en capacité de gouverner le pays.

Quant aux candidats Démocrates pour 2020, Chomsky est mitigé vis-à-vis d’Elizabeth Warren et plus enthousiaste au sujet de Bernie Sanders :

Je trouve [Warren] plutôt honnête. Je pense que beaucoup de ses projets sont parfaitement sensés. Elle travaille avec des économistes très sérieux, dont certains sont mes amis. Mais elle ne fait pas semblant, elle ne prétend pas qu’elle appelle de ses voeux, ni qu’elle va tenter des changements institutionnels radicaux.

Sanders, oui. De plus, elle n’a pas suscité de mouvement politique populaire comme Sanders l’a fait. Or, c’est ça qui marche. C’est comme ça qu’on obtient des élus au Congrès, comme ça a été le cas, par exemple, pour [la Représentante Alexandria] Ocasio-Cortez, grâce à ce mouvement.

L’interview complète se trouve ici (https://theintercept.com/2019/10/31/deconstructed-special-the-noam-chomsky-interview/)

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