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D’après Alternatives Economiques du 21 Novembre 2022

La bonne nouvelle dans un trop plein de promesses à la COP27

Par Bruno BOURGEON

samedi 7 janvier 2023, par JMT

La bonne nouvelle dans un trop plein de promesses à la COP27

Tribune de la COP27

En dépit des critiques formulées par les grandes coalitions, des menaces de veto, le président de la COP27 a arraché une série d’accords. Entre deux interruptions de séance, le ministre des Affaires étrangères d’Egypte n’a cessé, des heures durant, de négocier et de faire voter les textes préparés par son équipe.Devant une salle à moitié vide, désertée par de nombreuses délégations, juste peuplée de négociateurs et d’observateurs minés par le sommeil, il a fini par acter la fin de la COP27 alors que l’aube pointait sur la mer Rouge. Seuls les officiels de la tribune ont applaudi la fin de la conférence. Signe d’une immense fatigue des participants. Et pas seulement physique.

Car, à mesure que se succèdent les séances annuelles de ce parlement mondial du climat, les sujets se multiplient, les problèmes se complexifient, les décisions semblent toujours plus difficiles à prendre. Avec des échéances qui s’approchent à grand pas. Dans leur dernière étude, publiée le 11 novembre, les climatologues du Global Carbon Project rappellent que les émissions anthropiques de gaz carbonique progresseront encore de 1% cette année. Et qu’au rythme actuel d’émission, nous aurons consommé notre budget carbone menant à un réchauffement de +1,5°C avant 2030.

Organisée dans la station balnéaire de Charm-el-Cheikh, la COP27 était, dès le départ, chargée d’un agenda très lourd. De la question du genre dans la lutte contre le réchauffement climatique au fonds d’adaptation en passant par les financements, la conjugaison des politiques climatiques à court et long termes, la comptabilité des émissions, l’organisation des marchés du carbone… Diplomates et experts devaient plancher sur une trentaine de thématiques aux enjeux pas toujours évidents, telle l’évaluation des impacts sociaux des mesures de riposte ; un serpent de mer surgi à la fin des années 1990.

La présidence égyptienne savait que son mandat serait jugé à l’aune d’une demi-douzaine de grands sujets : la prise en compte de la science, notamment les messages du sixième rapport d’évaluation du GIEC, la mise en œuvre des décisions passées, les questions énergétiques, l’atténuation (la baisse des émissions de gaz à effet de serre), l’adaptation, les pertes et dommages, les financements. Sans oublier la biodiversité, l’agriculture ou l’océan.

La mesure qui restera dans les annales est, évidemment, la création d’un mécanisme financier dédié à la compensation des pertes et dommages, ces dégâts climatiques subis par les pays du Sud. La suite de l’accord, 94 paragraphes, est moins mirobolante. Cette 27e conférence des parties à l’accord de Paris réaffirme ainsi l’objectif édicté l’an dernier à Glasgow lors de la COP26 : stabiliser le réchauffement entre +1,5°C et +2°C. Tout en rappelant que les impacts du réchauffement seront moindres avec la borne basse qu’avec la haute. Menacé de disparition, cet objectif a fait l’objet d’une intense bataille diplomatique.

Dans la nuit précédant l’accord, le vice-président de la Commission européenne a menacé de quitter la table de négociation si l’objectif de +1,5°C n’était pas maintenu. Frans Timmermans a obtenu gain de cause. Le texte adopté en Egypte rappelle également que l’atteinte de la neutralité carbone en 2050 impose de réduire nos émissions de gaz à effet de serre (GES) de 43% entre 2019 et 2030.

Les délégués réunis en Egypte demandent ainsi aux Etats parties à l’accord de Paris de communiquer d’ici un an leur nouvelle contribution volontaire nationale à la baisse des émissions de GES. Cette esquisse de politique climatique à 2030 devra, en outre, être cohérente avec les politiques à long terme que les Etats doivent aussi publier.

Sur le plan financier, les parties s’inquiètent toujours du fait que les pays les plus riches n’ont toujours pas tenu leur promesse d’allouer 100 milliards de dollars par an aux pays vulnérables à partir de 2020. Elles rappellent aussi qu’il faudra investir, collectivement, 4000 milliards de dollars an par dans les énergies renouvelables d’ici à 2030, pour espérer atteindre la neutralité carbone vers 2050. Ça n’est pas rien.

Pour autant, l’accord obtenu à l’arraché par la présidence égyptienne pose beaucoup de questions. A commencer par le fonds de compensation des pertes et dommages. Personne ne sait qui l’abondera, et comment, ni quels en seront les bénéficiaires. Certains négociateurs évoquent le recours à des « financements innovants ». Un mot fourre-tout dans lequel chacun met ce qui l’arrange : une taxe sur les énergies fossiles, le transport aérien ou le fret maritime, etc. Agnès Pannier-Runacher, la ministre française de la Transition énergétique, évoque aussi la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. En principe, un comité de 24 experts devra formuler des propositions qui seront discutées lors de la COP28, à Dubaï.

Autre sujet de préoccupation : un petit paragraphe du chapitre consacré à l’énergie. En trois lignes, il demande d’améliorer les bouquets énergétiques à coups d’énergies renouvelables et d’énergies bas carbone. Problème : qu’entend-on par énergie bas carbone ? Les conseillers de Frans Timmermans estiment que le vocable désigne le nucléaire et le captage de CO2. D’autres experts soulignent que le gaz est moins carboné que le charbon. Dans sa taxonomie environnementale, l’Union européenne considère d’ailleurs cette source d’énergie comme bonne pour la transition.

Le texte demande aussi la fin des subventions aux énergies fossiles. Là encore, le débat sur l’efficacité, notamment climatique, des aides à la consommation de pétrole, de charbon et de gaz est sans fin. Tout aussi problématique est la disparition des appels à « sortir » des énergies fossiles qu’on trouvait dans les versions préliminaires du texte. C’est tout juste si la décision adoptée dimanche propose d’accélérer les efforts visant à réduire l’usage de centrales à charbon non dotées de systèmes de captage.

Un seul chiffre : les champs de pétrole et de gaz dont l’exploitation a été décidée cette année contribueront à émettre 70 milliards de tonnes de CO2 d’ici à 2025, révèle une étude publiée le 16 novembre par Oil Change International. De quoi amputer de 18% notre budget carbone pour stabiliser le réchauffement à +1,5°C !

Sachant par ailleurs qu’il existe des menaces sur les marchés du carbone. La COP27 devait finaliser la rédaction des règles encadrant les marchés du carbone. La décision concernant l’article 6.2 de l’accord de Paris (échange de crédits carbone entre Etats) permet aux gouvernements de mener leurs tractations dans le plus grand secret. Pour mieux masquer la non-implication de pays dans les échanges bilatéraux de ces crédits.

Autre sujet d’inquiétude : ces crédits certifiant des baisses d’émission pourraient tout à la fois être mis à l’actif de l’institution ou de l’Etat qui les achète et du pays où ces baisses sont réalisées. Rejeté l’an passé, ce double comptage est revenu en grâce à la COP27. Les règles devraient être présentées lors de la COP28.

Autre sujet rétabli en 2022 : le concept d’émission évitée. L’idée : ne plus couper une forêt favoriserait le stockage de carbone, ce qui permettrait d’acquérir des crédits carbone. Cependant, il est difficile d’établir la péréquation de telles opérations. Les discussions sont ouvertes.

Tout comme celles sur les promesses méthaniques. C’était l’une des grandes annonces de la COP26. A Glasgow, 100 pays s’étaient engagés à réduire d’un tiers leurs émissions de méthane entre 2020 et 2030. Un sacré effort : le méthane a un effet de réchauffement 28 fois supérieur à celui du CO2. Cette dynamique se poursuit. Le 17 novembre, les Etats-Unis et l’Union européenne, co-animateurs de ce programme, ont fait le point des adhésions aux Global Methane Pledge. Ce sont maintenant 150 pays qui promettent de réduire leurs fuites de gaz naturel, les émissions de leurs décharges et le torchage de routine des gaz associés à la production de pétrole. De quoi éviter un échauffement de 0,2°C.

Bruno Bourgeon, président d’AID http://www.aid97400.re

D’après Alternatives Economiques du 21 Novembre 2022

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