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D’après Reporterre du 14 Juin 2022

Un avant-goût de notre futur climatique

Par Bruno Bourgeon

mardi 26 juillet 2022, par JMT

Un avant-goût de notre futur climatique

Des tournesols à Durtal (Maine-et-Loire) en 2020 (© JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP)

D’ici 2050, les canicules risquent d’être multipliées par deux. Conséquences : récoltes desséchées, feux de forêt en hausse... Le déni de gravité n’est plus une option.

Une canicule exceptionnelle pour la saison a déferlé sur une grande partie du pays la semaine dernière. La France a vécu l’une des vagues de chaleur les plus précoces jamais observées depuis le début des relevés météo. Couplé à la sécheresse, cet épisode fait craindre le pire pour les écosystèmes alors que l’été n’a pas débuté.

Il est très probable que de nombreux records mensuels pour le mois de juin seront battus. Le mercure a frôlé les 40°C localement, notamment dans le sud-ouest, à proximité de Toulouse. À Bordeaux, le ressenti atteignit 41°C pour une température sous abri de 37°C. Le pic d’intensité fut entre jeudi et samedi : des températures supérieures à 35°C. Des nuits sans air étouffantes.

À l’origine de ce phénomène : une plume de chaleur. Des masses d’air torrides venues d’Afrique du Nord et de Mauritanie ont remonté vers la France, aidées par une dépression au large du Portugal qui agit comme une pompe à chaleur et accélère le processus. L’air file vers le Nord comme dans un entonnoir.

Cette vague inédite, si tôt dans la saison, alarme les spécialistes. L’exception devient la norme. En 2019, une canicule avait déjà frappé la France, en juin, et battu des records absolus de température. Cette année, la canicule arrive deux semaines en avance par rapport à 2019. Pour le climatologue Christophe Cassou , « nous vivons un avant-goût de notre futur climatique ».

La situation actuelle doit être replacée dans un contexte plus général de réchauffement climatique. Les sept dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées. Tout s’accélère et s’intensifie.

Nous avons connu autant de vagues de chaleurs entre 1960 et 2005 (en 45 ans) que de 2005 à 2020 (en 15 ans) : on compte 4 vagues de chaleur avant 1960, 4 entre 1960 et 1980, 9 entre 1980 et 2000, et enfin 26 depuis 2000. En ce début du XXIe siècle, les épisodes caniculaires sont devenus sensiblement plus nombreux que ceux de la période précédente.

Dans son dernier rapport, le GIEC est formel sur le sujet. L’ampleur des extrêmes de température augmente plus fortement que la température moyenne mondiale. Et l’influence humaine favorise l’émergence de phénomènes d’ordinaire exceptionnels.

« L’évènement de juin 2019 aurait eu une probabilité infime de se produire en climat préindustriel, précise la climatologue Valérie Masson Delmotte sur Twitter. Chaque incrément de réchauffement supplémentaire va continuer à augmenter la fréquence et l’intensité des extrêmes chauds ». Des études ont été faites pour la période de juillet 2019. Elles ont montré que cette vague de chaleur était 600 fois plus probable que dans un climat non modifié par l’humain.

Ces événements viennent frapper de plein fouet la génération climat. Alors que les élèves de terminale s’apprêtent à passer leur épreuve de philosophie au baccalauréat, mercredi 15 juin, sous la torpeur, c’est cette même classe d’âge qui avait vu, en 2019, la date de leur brevet des collèges décalée à cause de la canicule.

Selon une étude publiée par la revue Science en septembre 2021, les enfants nés en 2020 subiront 7 fois plus de vagues de chaleur, 2 fois plus de sécheresses et incendies de forêt, 3 fois plus d’inondations et de mauvaises récoltes qu’une personne née en 1960.

Notre quotidien est bouleversé. En France, la fréquence des canicules devrait doubler d’ici 2050. Selon Météo France, « en fin de siècle, les vagues de chaleur pourraient être non seulement bien plus fréquentes qu’aujourd’hui mais aussi beaucoup plus sévères et plus longues » et « se produire de mai à octobre ».

Toujours selon l’institut, depuis 2015, en six ans, nous avons 80% de probabilité en plus d’avoir une canicule. Si rien n’est fait pour maîtriser les émissions de GES, il y a trois chances sur quatre pour que le nombre annuel de jours de vague de chaleur passe de 5 à 25 en fin de siècle par rapport à 1976-2005.

À court terme, la vague de chaleur qui s’abat sur la France pourrait avoir de graves conséquences. Elle survient un mois seulement après une première vague en mai, déjà qualifiée d’exceptionnelle. Ces hausses arrivent après un printemps particulièrement sec qui a asséché les sols sur une grande partie du pays. Au 1er juin, l’indice d’humidité des sols atteignait une valeur habituellement rencontrée à la mi-juillet.

La canicule ne va rien arranger. De plus en plus de départements mettent en place des restrictions d’utilisation de l’eau. Au 12 juin, 35 départements avaient pris des arrêtés en ce sens, selon le site officiel Propluvia contre 22, dix jours auparavant.

La situation fait craindre le pire pour les récoltes. Cette année, l’agriculture française avait déjà subi le gel tardif, la sécheresse prolongée depuis janvier et un échaudage en mai. La nouvelle vague de chaleur risque d’accélérer la maturité des cultures et d’en brûler une partie. Pour certaines espèces comme l’orge de printemps, le blé ou les petits pois, les chaleurs vont avoir des effets sur le remplissage du grain.

Avec le mercure qui grimpe, c’est aussi le risque d’incendie et de feux de forêt qui s’accroît. Si les températures atteignent 40°C, l’indice d’inflammabilité des forêts sera « extrême » jusqu’en Alsace. Les écosystèmes vont en pâtir.

Les climatologues somment les autorités à agir. Le gouvernement n’a pas pour l’instant réagi ni communiqué sur cette vague de chaleur.

Il y a 15 jours, sur LCI, l’ex-ministre de la Transition écologique, Amélie de Montchalin (d’ores et déjà virée du gouvernement, pour cause d’échec électoral, avant même d’avoir agi -mais ne nous en faisons pas pour elle, avec ses diplômes d’Harvard et d’HEC, elle ira sévir sur le climat ailleurs-) avait seulement invité les Français à « être sobres » et à « ne pas surutiliser leur climatiseur pour lutter contre le dérèglement climatique ». Quelle oie inconséquente !

Bruno Bourgeon http://www.aid97400.re

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